Porsche était particulièrement attendu au tournant avec le Taycan. Le constructeur allemand avait une marge d’erreur assez faible pour proposer un modèle à la hauteur des exigences du public (et là je ne parle pas de celle des acheteurs). Comment, cette voiture qui était annoncé dès sa confirmation comme une « Tesla Killeuse », se comporte-t-elle sur la route ? Qu’est-ce qu’elle apporte dans la sphère de l’électro-mobilité ? Je vais vous confier mes premières impressions sur cette nouveauté que j’ai eu l’occasion de tester sur les routes de la région parisienne.
ADN Porsche respecté
Ce Porsche Taycan est finalement très proche du concept Mission E qui avait été présenté à l’IAA Francfort en 2015, et déjà à l’époque, il avait séduit par sa proposition audacieuse. Même moi qui ne suis pas très Porsche à la base (oui oui vous pouvez me huer, j’assume), j’avais été interpellée par ce qui se dessinait pour l’avenir électrique de la marque.
On retrouve dans le design du Taycan tous les marqueurs d’une Porsche, on peut cacher les blasons de la marque, on l’identifie tout de suite dans l’esprit du constructeur. Le Taycan trouve assez naturellement sa place entre la gamme 911 et la Panamera. Une vraie 4 places coupé à 4 portes, même si comme souvent dans ce type de carrosserie, les places arrière profiteront plus à des enfants ou à des adultes, mais de préférence sur des distances raisonnables.
Côté esthétique, j’ai beau chercher quelque chose à redire, je sèche. Le coup de crayon est vraiment soigné, et finalement le seul détail qui fait grincer des dents, c’est les appellations « Turbo » et « Turbo S » apposées à l’arrière dans ces finitions.
A l’intérieur également l’ensemble est soigné, l’environnement 100% numérique s’impose, mais c’est tout naturel quand on parle de mobilité électrique, les puristes n’auront rien à redire. Les assemblages sont bien sûr à la hauteur du standing de la marque, tout comme la qualité perçue des matériaux.
A quoi d’autre pouvait-on s’attendre de la part de Porsche de toute façon ?
Les performances de Taycan
On a donc déjà conclu que côté design extérieur et intérieur, c’était bien une Porsche, mais nous allons voir ensemble que côté performance aussi, ce Taycan se révèle un instrument d’une efficacité redoutable.
J’ai eu l’occasion de prendre en main la version Turbo, mais si vous n’êtes pas encore familier avec les différentes versions de Taycan, je pense que le tableau suivant vous aidera à y voir plus clair :
Taycan | 4S | 4S Battery plus | Turbo | Turbo S |
Puissance | 435 ch | 490 ch | 625 ch | 625 ch |
Puissance avec boost | 530 ch | 571 ch | 680 ch | 761 ch |
Capacité batterie | 79.2 kWh | 93.4 kWh | 93.4 kWh | 93.4 kWh |
Autonomie WLTP | 407 km | 463 km | 450 km | 412 km |
Prix (à partir de) | 108 632 € | 115 208 € | 155 552 € | 189 152 € |
L’entrée de gamme 4S est la seule version à être proposée avec une batterie de capacité inférieure, elle ne devrait pas être vraiment représentative des ventes. Il est fort à parier que les acheteurs iront plus naturellement vers la version 4S équipée de la « performance battery plus » de 93.4 kWh et ses 571 ch max pour quelques milliers d’euros en plus.
Quant à ma version Turbo, les chiffres parlent d’eux-mêmes à mon avis. Avec son couple immédiat, les 625 ch (et 680 ch en mode overboost) mettent en mouvement les plus de 2.3 tonnes du Taycan en un battement de cil. La notion de poids est littéralement gommée par la puissance déployée par les moteurs électriques. Avec le launch control, elle abat le 0 à 100 km/h en 3.2 secondes (2.8 sec pour le Taycan Turbo S), et même sans cette aide au décollage, le Taycan Turbo est déjà capable de vous coller au siège lors des phases d’accélération.
Là où Porsche Taycan se distingue de son concurrent le plus direct, la Tesla Model S (elles sont de même gabarit avec 4.97 m de long), c’est sur le fait que la voiture est en mesure de reproduire l’effort sans perte de performances et sans un échauffement trop rapide de la batterie (qui mettrait le véhicule en sécurité). D’ailleurs, il est surprenant de constater à quel point la marque a bien insisté sur cette notion dans sa communication, car il est vrai que sur le jeu des départs arrêtés la différence reste plus mince, et même parfois polémique. Mais concrètement, ce débat puéril de « qui a la plus grosse » n’est qu’un détail qui obsède certains, pour les autres, c’est la cohérence de l’ensemble qui prime (encore heureux). J’ai beau aimer Tesla, je dois bien avouer que le savoir-faire de Porsche place le Taycan devant sur plusieurs aspects.
Il y a quatre points techniques qui sont intéressants sur ce nouveau Porsche Taycan :
- L’architecture en 800 Volts, quand les autres utilisent du 400 Volts. Plus léger (câbles plus fins), gain de place, meilleures performances en continu, et un atout pour la recharge rapide.
- La transmission à deux vitesses sur l’essieu arrière, quand les autres n’ont qu’une vitesse (enfin un simple réducteur), cela permet notamment d’exploiter la puissance maximale sur les sollicitations « sortie de péage », quand la seconde vitesse, elle, permettra d’économiser de l’énergie en ne sollicitant pas inutilement le moteur du train arrière.
- Le moteur synchrone à excitation permanente, qui offre des performances élevées en permanence.
- Le système de récupération, qui permet de ne pas solliciter les freins dans 90 % des cas.
Châssis aux petits oignons, roues directrices à l’arrière, direction précise, le Taycan est sans surprise, son comportement routier est net et précis. Redoutable même tant il est facile de le prendre en main, la voiture est rivée au sol. Là où une Model S est déjà bonne, Taycan fait mieux, mais il faut bien justifier un prix plus élevé. A la différence de Tesla, le Taycan propose une option sonore (Porsche Electric Sport Sound) pour accompagner les accélérations, un son certes artificiel, mais qui est une alternative à ceux qui sont déroutés par l’absence de bruit des véhicules électriques.
Tesla killer ou pas ?
Tout dépend ce que l’on compare, pour moi la réponse de Normand s’impose, c’est « oui » et « non ».
Confort/Qualité
En effet, le Taycan a des finitions et un confort supérieur à ce que propose Tesla, mais au prix de quelles options supplémentaires venant alourdir la facture déjà salée, quand sur Tesla, les options sont réduites au minimum. Reste que Taycan est largement au-dessus.
Performances/Comportement routier
Si Tesla a longtemps fait parler la poudre, Porsche vient lui tailler des croupières avec un modèle d’une efficacité beaucoup plus pointue encore. La note technique est donc plus élevé sur Taycan, Tesla est encore un peu brut de décoffrage.
Infrastructure de recharge
Pour le coup, Tesla conserve quelques années d’avance sur le sujet. Même si le réseau Ionity met les bouchées doubles pour s’étendre, il est encore trop absent pour proposer un bon maillage et surtout son coût (abonnement + prix à la consommation) pourrait refroidir ceux qui sont des gros rouleurs.
Design / style
Je dirais match nul, car les goûts et les couleurs cela ne se discute pas.
Technologies et aides à la conduite
Là aussi, Tesla avait une bonne longueur d’avance, mais celle-ci s’est grandement réduite. Il y a plus de créativité chez les Américains (et des futilités), là où Porsche propose du fonctionnel et de l’efficace. Match nul.
Prix
Forcément, Tesla ressort en tête dans cette comparaison, mais il ne faut pas oublier que les modèles puissants et performants de la firme américaine ont longtemps dépassé les 100 000 € également. Mais sur ce point là, clairement, le Taycan n’est pas un concurrent direct, il vise une clientèle plus haut de gamme.
Si sur le principe on pourrait croire que Model S et Taycan ciblent le même public, je pense que la cible commune est très restreinte, et les modèles peuvent très bien cohabiter sans chercher à écraser l’autre. Le Taycan est plus pointu et plus haut de gamme, quand Tesla est finalement plus accessible sur tous les points.
Le Porsche Taycan est-il parfait ?
Quasi, surtout quand on compare aux premiers véhicules électriques des autres marques Premium, bien sûr je ne me base que sur mes observations lors d’un essai sur une journée (un peu court pour tout juger, mais déjà bien pour dégrossir). C’est d’ailleurs ce qui me frustre avec Porsche, les modèles sont les bons élèves de la classe, toujours propres sur eux, toujours au taquet, toujours performants, toujours trop en somme. Moi j’aime bien les imperfections, c’est ce qui donne aussi du caractère à une auto.
Pourquoi n’est-il pas parfait selon moi ? Parce que sa consommation est assez élevée. Forcément, on a une voiture très performante, donc on peut vite être tenté d’avoir une conduite un peu plus dynamique qu’avec d’autres VE, mais mon essai a été plutôt tranquille, mais pas ma consommation moyenne avec 20.5 kWh/100 km sur les 63 km de l’après-midi. J’ai bien entendu poussé un peu la voiture, mais sans vraiment me prendre pour une pilote, l’itinéraire ne s’y prêtait pas vraiment et je tiens à mes points (car ça peut vite être problématique avec les VE sportifs).Bref, j’étais en promenade du dimanche en quelque sorte.
D’ailleurs, les consommations WLTP sont un bon indicateur : 26,6 – 22,9 kWh/100 km, quand Tesla est en dessous de 20 kWh/100 km et je ne parle pas de voitures plus raisonnables comme le e-Niro en dessous des 16 kWh/100 km.
Bref si pour l’essence, un Porschiste ne regarde pas sa consommation et dégaine sa CB quand cela est nécessaire, pour le moment quand on parle d’électro-mobilité, la consommation est quand même le nerf de la guerre, tant la question de la recharge reste une problématique dans le quotidien de certains conducteurs, dès lors qu’on se recharge ailleurs qu’à domicile.
En Bref
Que l’on aime Porsche, ou non, que l’on aime les véhicules électriques, ou non, ce Porsche Taycan est un produit déjà bien abouti et plaisant à conduire. Efficace, séduisant, performant, mais pas tout à fait efficient, il a quand même largement des arguments en sa faveur, et ses accélérations mettront tout le monde d’accord, il ne s’agit pas d’un OVNI la gamme Porsche. Il s’y intègre au contraire parfaitement.